Le ministre a annoncé ses mesures pour " mieux soutenir les professeurs, adapter l'organisation aux besoins de chaque élève et rehausser le niveau d'exigence et d'ambition pour tous les élèves". Derrière ces mots, un empilement de mesures passéistes.
Les hirondelles annoncent le printemps, les données PISA annoncent les réformes de l’École
Décryptons tout d’abord le sigle PISA : il s’agit du Programme International pour le Suivi des Acquis des élèves.
Comme tous les 3 ans, l’OCDE a rendu son bulletin de notes des systèmes éducatifs avec cette année un focus sur les compétences mathématiques. Comme tous les 3 ans, la France constate avec amertume que le niveau de son système éducatif ne progresse pas. Les statistiques que nous produisons au niveau national nous le laissaient déjà percevoir. PISA dit bien d’autres choses sur notre système éducatif, dommage que le ministre ait choisi de les ignorer. L’enjeu est d’en donner une traduction politique cohérente et durable.
Ce que dit PISA 2022, c’est que le premier quinquennat de M. Macron n’a pas permis d’enrayer les inégalités scolaires. Si vous êtes issu.e de milieu modeste, le chemin sera plus rude et plus escarpé et les chances d’ascension sociale par l’école moins importantes. Pourtant, ce n’est pas faute d’avoir instauré déjà mesures, réformes et procédures nouvelles.
Une concertation express et un rapport resté confidentiel
Avec une habileté politique certaine, Gabriel Attal avait annoncé début octobre une grande consultation de 8 semaines pour provoquer un choc d’exigences. Cela lui permet de donner le jour même du « diagnostic PISA » le remède aux maux de l’école.
Ces mesures s’appuient-elles sur les préconisations de la mission exigence des savoirs ? En l’absence de publication du rapport, difficile à dire. Mais, pour qui a lu les questions de la consultation en ligne, peu de place au doute quant à penser que les réponses étaient déjà préparées.
Les mesures annoncées ne sont pas de nature à répondre aux défis majeurs de notre système éducatif.
Soutenir les enseignant.es en bridant la liberté pédagogique ?
Le ministre propose d’abord de « mieux soutenir » les enseignant.es, ce qui parait indispensable.
Ce « soutien » se traduirait par de nouvelles modifications des programmes et du socle, dans un délai très contraint, ainsi que des injonctions dont la conséquence sera de limiter la liberté pédagogique. En revanche, nulle assurance de moyens pour alléger les effectifs, nulle trace de confiance accordée à l’échelon local.
Quant à ce qui pourrait sembler présenter un intérêt, l’introduction des compétences psychosociales dans le socle commun, nous ne pouvons qu’être méfiants et dubitatifs. En effet, quelle place pour ce nouveau socle quand, par ailleurs, il n’est surtout fait référence qu’aux maths et au français, à des repères annuels et à une évaluation de fin de collège dans laquelle les compétences ne seront plus prises en compte ?
PISA montre que les réformes qui s’empilent sont inefficaces
Le deuxième axe des préconisations demande d’adapter l’organisation des enseignements aux besoins de chaque élève.
Le système et ses acteurs, ses actrices souffrent de ces réformes permanentes qui s’empilent les unes aux autres sans trouver du sens. C’est d’ailleurs ce que montre PISA. Les systèmes éducatifs qui progressent au niveau des résultats et au niveau du bien-être des élèves et des personnels sont ceux qui décorrèlent leurs réformes du temps politique.
Rehausser le niveau en tournant le dos aux recherches en éducation ?
C’est dans le 3ème axe, « Rehausser le niveau d’exigence et d’ambition… » que l’on retrouve les plus vieilles recettes à base de notes, d’évaluations nationales, de « DNB couperet ». Le Sgen-CFDT ne voit pas l’intérêt de ces propositions rétrogrades et est opposé à une forme d’examen d’entrée au lycée.
Ces recettes ne fonctionnent pas, les études le montrent et elles participent au contraire à l’inefficience du système.
Conditionner l’accès au lycée aurait de nombreuses répercussions sur la préparation de l’orientation en fin de 3ème et le calendrier d’affectation.
Enfin, toutes ces mesures ne tiennent absolument pas compte des données de santé de nos élèves. PISA 2022 confirme que l’élève français est parmi les plus anxieux de l’OCDE. Aucune proposition sur l’évolution des systèmes d’évaluation, aucune réflexion sur la diversification des formes d’accès aux savoirs et des champs de réussites variés. Un soi-disant retour du redoublement qui se traduirait dans les faits par des stages de remise à niveau ou des adaptations pédagogiques est davantage un effet d’annonce.
L’OCDE préconise « non pas plus d’École, mais mieux d’École ». Pour cela, il faut du temps pour les acteurs et les actrices pour réfléchir et coordonner son action en équipe. Le travail doit faire sens pour les collègues. C’est ce que demande le Sgen-CFDT.